LA CHRONIQUE
Les étapes de la tournée du GMJO dirigé par Claudio Abbado Gustav Mahler
Gustav Mahler Symphonie n°9 en ré majeur Gustav Mahler Jugendorchester Claudio Abbado
|
Deux folles en vacances ou le Wanderer à la Poursuite du GMJO à travers l’Europe Le premier concert à Bolzano a déjà été décrit ailleurs. Ce Wanderer admet qu’il a été « cueilli à froid », si on lui permet l’expression. Même en sachant que Claudio Abbado est un grand formateur d’orchestres, il ne s’attendait ni à une technique aussi brillante, ni à une telle homogénéité du son, ni à une telle profondeur de sentiment. A Budapest l’orchestre a eu de la peine à trouver place sur une scène, qui pourtant n’était pas si petite que cela. Dans ces conditions ne jouer« que » la symphonie (suite à la maladie d’Anna Larsson) était un pis aller acceptable. Soirée de nouveau marquée par un bouleversement et une tension sans pareils. A part cela le Wanderer a été déçu par Budapest. Les hongrois sont ils passés directement du communisme au capitalisme sans passer par la culture ? Partout d’un côté de vieux bâtiments magnifiques en décrépitude, d’un autre côté des nouveaux magasins et (surtout) de grandes chaînes (souvent américaines) destinés, on le sent, en premier lieu aux touristes. A l’étape suivante, Bratislava, tout est différent. Bien sûr, ici aussi les banlieues sont laides, mais le centre historique de la ville est très beau, a très bien été refait et on voit partout des magasins locaux. Anna Larsson n’est pas encore tout à fait remise, mais elle ose chanter - et gagne le pari. Ce n’est pas un plaisir pur néanmoins car on sent la nervosité et le soulagement quand tout est fini. Mais compliments à la chanteuse d’avoir tenu le coup. Ici la scène est plus grande, mais la salle plus petite qu’à Budapest. La symphonie semble de plus en plus belle, mais aussi de plus en plus effrayante et pénétrante. Le Wanderer avait depuis toujours (dû à ses intérêts historiques) voulu visiter St. Petersbourg, mais étant donné qu’il a une peur folle des avions il n’était jamais arrivé à y mettre les pieds. Quoi de mieux qu’un concert là dirigé par Claudio Abbado, la seule personne qui arrive à lui faire entrer dans une de ces machines volantes?!? La ville nous accueille en plein soleil avec un ciel bleu, sans nuages, des températures agréables et des blocs de glaces sur la Neva! Superbe! Plusieurs amis ont prévenu le Wanderer des problèmes de sécurité, mais il est vigilant et se sent très à l’aise dans cette ville si belle. Bien sûr, quoique le soleil brillait dehors, une visite à l’Ermitage et ses merveilles est de rigueur. Le Wanderer a aussi réussi à voir la Forteresse de St. Pierre et St. Paul entre autres, mais malheureusement pas plus... Le soir la belle salle de la Philharmonie est pleine, Anna Larsson est de nouveau en bonne voix et les spectateurs peuvent entendre une 9e de Mahler de plus en plus angoissante par son intensité. Heureusement, contrairement à des craintes antérieures, on voit beaucoup de russes. Venu du nord de l’Europe en plein soleil le Wanderer s’attend à retrouver celui-ci en Italie mais hélas à l’arrivée à Milan de même qu’à Reggio Emilia il pleut! Se peut-il que le temps s’adapte aux sentiments du Wanderer et se souvient lui aussi de Verlaine: « Il pleut dans mon coeur comme il pleut sur la ville... » ? Car celui de Reggio est le dernier concert pour les deux folles en vacances et la tristesse règne. De nouveau une 9e à vous déchirer le cœur, de nouveau un silence prolongé et magnifique. Mais après que la tension s’est peu à peu dissoute vient le lancement traditionnel de fleurs. C’était la première fois pendant cette tournée, l’orchestre a semblé apprécier et le Wanderer a jeté avec passion ces fleurs qu’un gentil membre du CAI avait préparé pour lui . Les spectateurs ne nous ont pas déçus. Si dans la première partie à Bolzano le Wanderer était très énervé (jamais il n’a entendu tant de programmes tomber par terre!), là comme partout ailleurs il y a eu un silence prolongé et bouleversant à la fin. A St. Petersbourg après l’Abschied les applaudissements ont commencés trop vite, mais après la symphonie ils se sont « rachetés ». Pourtant c’est à St. Petersbourg que le Wanderer a entendu les seuls mobiles sonner (un pendant l’Abschied, l’autre dans la symphonie). Gustav Mahler a toujours voulu avoir un orchestre de jeunes pleins d’enthousiasme. Ici son vœu a été exaucé. L’orchestre a joué avec une technique parfaite, il avait un son homogène qui étonne étant donné le nombre quand même limité de répétitions et il a fait preuve d’une intensité bouleversante et d’une maturité incroyable. Claudio Abbado, qui (on le sait) n’est jamais mieux qu’avec ces jeunes, est en grande forme. Il est à la fois attentif et encourageant, mais en même temps concentré et intensif. Il a le contrôle absolu sur tout et en même temps il se laisse emporter par les émotions profondes de cette partition. Une grande chaleur intérieure brûle en lui et ses jeunes musiciens ont réussi à transporter cette lumière. Le Wanderer, comme déjà tant de fois, est extrêmement reconnaissant de tout ce qu’il a eu le droit d’entendre et remercie tous les participants du fond de son cœur.
|
|