La cronaca del Wanderer

Le Wanderer - en français "le voyageur", rend compte de ses itinérances, de ses observations, de ses colères et de ses rencontres avec l'exceptionnel. Chacun de nous est le Wanderer: il suffit de nous envoyer un texte qui concerne la musique et plus particulièrement l'activité de Claudio Abbado, et nous le publierons!


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La chronique du Wanderer
N°1



Bravo Paris !

Le Wanderer réagit à l'annulation des concerts parisiens des Berliner Philharmonisches Orchester sous la direction de Claudio Abbado (Février 2001)


Il fallait s'y attendre. Après les polémiques publiques entre l'organisateur de concerts André Furno et les nouveaux propriétaires de la Salle Pleyel, les concerts de l'orchestre Philharmonique de Berlin dirigés par Claudio Abbado prévus en Février 2001 ont été annulés. Au delà du préjudice artistique subi par la capitale (au bénéfice de Rome, qui a récupéré les dates (le malheur des uns....), privée d'un événement musical exceptionnel (ce n'est pas tous les jours que l'une des meilleures phalanges du monde, l'un des chefs les plus importants et la crème des pianistes viennent pour une semaine exécuter l'intégrale des symphonies et des concertos pour piano de Beethoven), il faut réfléchir me semble-t-il sur deux points: d'une part la relation complexe entre Claudio Abbado et la France, d'autre part l'organisation musicale parisienne,dont la faiblesse est révélée par cette lamentable affaire.

Les apparitions de Claudio Abbado à Paris ont été émaillées d'incidents, de conflits nés il y a une vingtaine d'années avec le Simon Boccanegra de l'Opéra, extraordinaire souvenir pour les spectateurs, moins resplendissant pour le chef qui s'est amèrement plaint de l'Orchestre, au point qu'il n'a plus dirigé d'orchestre français depuis. On se souvient aussi de la polémique née autour de la production de Carmen, obligeant Liebermann à renoncer à Claudio Abbado , qui refusait de diriger l'Orchestre de l'Opéra. Plus récemment, Ferrare bénéficia d'un "Viaggio a Reims" initialement prévu au Théâtre des Champs Elysées. Cette année, c'est au tour de Rome de récupérer des concerts parisiens. Certes, les raisons en sont diverses, et multiples, et, dans les deux derniers cas au moins, le Maestro n'y est pour rien. Mais on ne pourra m'empêcher de penser que pour un tel événement, d'autres salles parisiennes eussent pu être disponibles: quel directeur de salle ne rêve pas d'un tel cast, même si les plannings décidés plusieurs années à l'avance ont pu empêcher de se transférer ailleurs. Pour toutes ces raisons, une fois de plus le public parisien n'aura pas le plaisir de découvrir le Beethoven d'Abbado dernière manière, que les auditeurs de Ferrare en février dernier ont découvert, suffoqués! En réalité, Abbado, tout en étant très respecté par la critique et toujours bien accueilli en France, n'est pas très connu du public français, tout du moins du public qui ne voyage pas. Paris n'aura jamais entendu ni Viaggio a Reims, ni Boris, ni les Gurrelieder, ni Tristan, ni en somme aucun des grands événements musicaux dont Claudio Abbado est le protagoniste: n'aurait-il pas été important que le Pelléas merveilleux de Vitez soit monté par une salle parisienne....? La liste est en tous cas longue. Ainsi les approches de Claudio Abbado de certaines partitions qui ont pu étonner par leur nouveauté (Les oeuvres religieuses de Mozart, très discutées, la Matthäus Passion de Bach) sont éventuellement accessibles au public français par radio ou disque mais pas en salle. Or le son "abbadien" passe souvent mieux en direct qu'en enregistrement. Certes, on ne pourra jamais tout faire entendre aux parisiens, et je ne suis pas naïf au point de penser que tout est si facile dans le monde de l'organisation des concerts, mais l'abbadien itinérant français qui écrit déplore vraiment que le public mélomane français ne puisse pas avoir accès à ce qui me paraît être des exécutions mémorables . Je me souviendrai toujours à ce propos d' Henry Louis De la Grange qui n'ayant entendu que les disques mahlériens de Claudio Abbado nourrissait quelques doutes. Il ne l'avait jamais entendu en salle. Dès qu'il entendit Mahler dirigé par Abbado "en direct", son opinion changea, complètement: il est désormais spectateur assidu de tous les concerts mahlériens de Claudio Abbado! Alors un souhait: quelle salle française, quel organisateur de concerts aura l'intelligence de proposer le Così fan Tutte de Ferrare avec les mêmes protagonistes?

La deuxième réflexion naît de cette déplorable affaire de la Salle Pleyel. Je ne veux pas entrer dans la polémique qui me semble naître de la volonté des propriétaires d'essayer de profiter de leur position de force à Paris (Pleyel est la seule salle de concert effective de grande capacité)pour jouer AUSSI les organisateurs de concerts sans en passer par les circuits traditionnels. Je veux simplement souligner d'une part que cette affaire nous rappelle le manque cruel d'un auditorium à Paris. Il semble que l'on s'achemine vers une solution pour les prochaines années, mais en attendant, ne pourrait-on pas faire comme à Lucerne où en attendant que le bâtiment de Nouvel soit livré, on a construit une salle provisoire à l'acoustique exceptionnelle et au prix raisonnable. Cela se fait un peu partout aujourd'hui, pourquoi pas à Paris ? D'autre part, cette affaire nous montre aussi les limites de la gestion privée, tant vantée par certains. Une salle aussi importante, aussi historique que Pleyel tombe en des mains pour le moins maladroites, et toute la vie musicale parisienne est suspendue aux diktats d'un propriétaire...De tels instruments doivent appartenir à des organismes publics, ou semi-publics, à des fondations, en somme à des structures dotées d'organismes de contrôle qui permettent d'assurer le service PUBLIC de la culture. Il est impensable qu'une salle essentielle à Paris comme Pleyel soit gérée au gré des désirs et des envies d'un individu. Mais la musique classique - voir la polémique autour du destin de France Musique - est-elle un enjeu culturel essentiel, en ces temps de massification de la culture ?