Ce concert est l'illustration de ce que nous disions à propos d'Abbado, si nous avions là du jamais vécu, nous avons ici le type même de concert de qualité du « classical music circus », un grand chef, supérieurement doué, qui a choisi une voie plus médiatique, un orchestre, supérieurement doué, qui joue « normalement » comme un orchestre supérieurement doué, un soliste, Frank Peter Zimmermann, supérieurement doué, qui donne un exemple technique d'une rare perfection .
Le résultat ? ...mitigé.
Dans un autre contexte, une tournée, le concert d'un soir à la Philharmonie, ou à la Salle Pleyel, sans doute un bon concert. Un grand concert sûrement pas. D'abord parce que Mozart ne fait pas vraiment partie du monde de Zubin Mehta. Nous avons là une interprétation routinière avec un soliste parfait techniquement, mais nous avions entendu et vécu Vengerov la veille et l'on ne pouvait que comparer, hélas, l'engagement de l'un et la parfaite retenue de l'autre. Il a fallu un bis d'une virtuosité à la limite du démonstratif et donc du déplacé pour déchaîner l'enthousiasme du public !
On oubliera donc Mozart pour mieux se concentrer sur Bruckner.
Il était stimulant de mettre en perspective Bruckner et Beethoven, d'autant qu'originellement, ce n'était pas Mozart qui était au programme mais Haydn (Symphonie n°96 « The miracle ») : les intentions étaient claires, il s'agissait de remettre Beethoven en perspective dans un panorama de la symphonie de Haydn à Bruckner. C'est tout de même bien le monde symphonique qui est au centre de ces concerts salzbourgeois, d'autant que les abonnés ont entendu la Symphonie n°2 de Beethoven dans le « concert répétition » organisé traditionnellement pour eux,. Il est peut être dommage d'avoir remplacé Haydn par Mozart, mais Mehta soutenait que Mozart était plus séduisant pour le public?
La Symphonie N°4 romantique est la plus « lumineuse » de ses symphonies, elle constitue un discutable morceau de bravoure pour les orchestres, notamment pour les vents et les cors, très sollicités notamment dans les exposés thématiques. Zubin Mehta en a fourni une interprétation indiscutablement intéressante. Après un fulgurant début, où le trémolo des cordes est exécuté à la perfection - résultat de la leçon des interprétations beethovéniennes récentes de l'orchestre - et où les cors font preuve d'une pureté sonore rare, il faut bien reconnaître que l'ensemble présente une alternance de très beaux moments, le premier mouvement, le troisième, les dernières minutes et quelques moments moins bienvenus, ou l'on joue très fort, trop fort et de manière un peu agressive. L'ensemble manque de cette sensibilité nécessaire à une grande exécution de cette symphonie, alors qu'une cohérence avec ce que nous avions entendu dans Beethoven était nécessaire, pour mieux comprendre les échos, les parentés et les évolutions. Mais la couleur même des Berliner était si différente qu'on avait peine à croire que l'on avait affaire aux mêmes individus que la veille. On avait devant soi des musiciens exceptionnels (les cors.. ! les vents ! ) , mais pas l'ensemble « animé » (de anima : âme), inspiré qui transcendait la veille Beethoven !
Il reste que nous avons là un très bon concert, avec cependant l'impression que l'engagement de Zubin Mehta tenait plus de la volonté de l'orchestre de jouer que de sa propre volonté d'entraîner l'orchestre?
C'est un peu dommage, pour un programme qui avait été modifié à sa demande.